L’Union des Oulémas africains ne condamne pas l’intervention française

Le 17 janvier 2013, l’Union des Oulémas Africains (UOA) (Itihad Oulama’ Afriqiya) a publié une déclaration (accessible ici en arabe) de sept pages sur les « évènements au Mali ».

Le communiqué des oulémas africains tranche avec la critique et la dénonciation de l’intervention française au Mali faites par une autre union d’oulémas, l’union mondiale des oulémas musulmans, présidé par Youssef al-Qaradawi, égyptien résidant au Qatar. En effet, l’union des oulémas africains fait porter toute la responsabilité du déclenchement rapide de la guerre aux « groupes armés » qui ont « attaqués des régions sous contrôle du gouvernement (ndlr : malien) ». (p.6 du communiqué).

Une telle divergence de position entre oulémas musulmans est fréquente, mais en l’espèce n’est pas de nature à susciter la surprise au regard du processus de genèse de l’UOA. Créée en juillet 2011 sous l’ère et le patronage d’Amadou Toumani Touré, l’ancien président malien renversé par un coup d’Etat de l’armée le 22 mars 2012, son objectif (ici simplifié) est d’unifier l’Islam en Afrique. En réalité, l’UOA fait plutôt penser à une redite en version africaine d’autres institutions islamiques officielles, chargées, sous le contrôle des autorités politiques, de favoriser la diffusion d’un islam quiétiste, modéré, voire accommodé, source d’allégeance aux pouvoirs en place.

De la pop au chant religieux, l’Islam vendeur ?

Voici un article sans lien direct avec les sujets traités habituellement sur ce blog, mais qui pose une question intéressante.

Comment cet homme, Junaid Jamshed, chanteur pakistanais le plus célèbre durant les années 1980 et véritable pop-star…

… est il devenu ce nouvel homme ? :

Autrement dit, comment expliquer le passage d’une vie de pop-star « à l’occidentale » à celle de pieu croyant, s’étant remis à la chanson avec l’interprétation de chants religieux ?

A ce stade, deux hypothèses paraissent possibles :

– Des raisons personnelles, liées à l’identité de celui qui se voit propulser au rang de « pop-star » et qui se questionne sur le sens de son existence dans de telles conditions, sur son rapport à l’argent, au bien et au mal etc… (cf le cas de Diams également pour la France)  :

« When I came back from a religious tour in 1997, I realized that there was so much more to life than just singing and jumping around » – an insight that eventually prompted his transformation from pop icon to devout Muslim. Junaid Jamshed explains: « When I decided to give up singing, a lot of people were shocked. But I was sure that it was the right decision because Allah forbids the kind of singing that I was doing, and it’s my duty to follow His command. » (Qantara.de, 2009)

-Des raisons plus contextuelles, tenant à la société pakistanaise elle-même et au statut et au rôle qu’y joue l’Islam. Ainsi, le nouveau visage de Junaid Jamsheed ne serait pas tant dû à une sincérité religieuse profonde, conséquences d’interrogations métaphysiques, mais plutôt à la juste perception de la bonne manière de continuer à faire de l’argent et d’occuper l’avant-scène médiatique. Il est ainsi aujourd’hui redevenu un chanteur très populaire, popularité qu’il perdait justement en 1997, mais sous une forme halal. Il a développé également une marque de vêtements et prospère dans différents business.

Il y a peut être des deux dans la trajectoire intéressante de cet homme, mais rien ne se serait produit s’il n’avait pas rencontré des membres de la Tablighi Jamaat, une organisation islamique pakistanaise influente dans la société. L’islam est une religion, pourvoyeuse à ce titre de sens pour ceux qui la suivent et la pratique. L’islam est également vectrice d’un business florissant (cf. « L’Islam de marché » de Patrick Haenni) qui a le grand avantage de donner un sens et une légitimité à une consommation, trop souvent élevée au rang de valeur supérieure dans certaines sociétés.